Invité des Grandes Gueules du Sport sur RMC, le neurochirurgien David Brauge, travaillant en collaboration avec la Fédération Française de Rugby et la Ligue Nationale de Rugby depuis plus de 10 ans, est revenu sur les récentes déclarations de Sebastien Chabal, assurant qu’il ne se souvenait de rien concernant sa carrière.
Un trou noir qui n’étonne pas le chirurgien. Si Sebastien Chabal a choqué en déclarant dans une interview n’avoir aucun souvenir ou mémoire de l’entièreté de sa carrière, mais aussi d’évènements de vie comme la naissance de ses enfants, le neurochirurgien David Brauge, expert des commotions cérébrales auprès de la FFR, n’est malheureusement pas surpris.
“Son témoignage traduit une vérité scientifique qu’on connaissait déjà pour les sports de combat, mais dont on s’est aperçu qu’elle touchait aussi ceux qui pratiquaient des sports par équipe et donc concernait énormément de monde“, explique-t-il ce samedi, invité dans Les Grandes Gueules du Sport sur RMC.
La faute aux chocs répétés ?
Lui explique que si Sebastien Chabal a évolué dans un rugby encore très peu conscient de la dangerosité des commotions cérébrales, ce sont très probablement d’autres chocs répétés qui ont entraîné cette perte de mémoire: “Le sportif est exposé aussi à d’autres chocs, pas forcément les gros traumatismes ou les commotions cérébrales, mais quand on est rugbyman on est exposé à de multiples chocs répétés: lors des phases défensives, des rucks, des participations aux mêlées…”
“Actuellement, une des questions qu’on se pose tous c’est: est-ce que accumuler des petits chocs dans sa carrière, n’a pas ensuite, dans la deuxième partie de la vie, comme M. Chabal actuellement, de conséquences sur les capacités intellectuelles?”
“Ces athlètes qui ont subi trop de chocs à la tête, lorsqu’ils passent la porte du cabinet, l’une des seules choses qu’on peut faire, c’est faire un état des lieux formel, mais c’est très compliqué d’établir un diagnostic. La seule façon de connaître vraiment l’impact de ces chocs répétés, c’est d’autopsier le cerveau une fois que la personne est décédée”, assure celui qui dit ne pas “connaitre pas l’ampleur réelle du phénomène chez les joueurs qui ont joué dans les années 1980, 1990, 2000“.
Des médecins militent pour diminuer le volume d’exposition aux chocs
Selon une étude menée sur d’anciens internationaux écossais, les joueurs de rugby ont plus de maladies neurodégénératives que le reste de la population, deux à trois fois plus. C’est le même risque que pour le football américain mais aussi le football européen. “Donc c’est principalement dû à ce nombre de chocs répétés du sport de haut niveau, estime-t-il. Mais si on regarde, ces sportifs vivent aussi plus longtemps que la moyenne, donc ils ont évidemment plus de chances d’avoir ces maladies dégénératives.”
Le Docteur Brauge préconise notamment auprès de World rugby de limiter le volume d’exposition aux chocs, avec des semaines entières d’entraînement sans contact et moins de match, limitant a fortiori les contacts.