Est-ce que le match en Italie des Bleus vous a rassuré un petit peu sur la forme des Bleus ?
On était surtout frustré après l’Angleterre parce qu’on n’a pas été pragmatique. Là, l’équipe de France a été brillante, plus que pragmatique, avec des statistiques incroyables, je crois 33 défenseurs, 15 franchissements, 11 essais. L’équipe de France est en train de changer dans son jeu, d’avoir un jeu avec beaucoup plus d’animation offensive, plus axé sur la possession que la dépossession.
Vous parlez de cette équipe de France qui évolue un peu dans son style de jeu, on a l’impression qu’il y a une volonté de taper fort devant, puis créer un peu de désordre. Est-ce que vous pensez que les Bleus sont capables de mettre ce désordre dans peut-être l’équipe la plus organisée du plateau international, c’est-à-dire cette équipe irlandaise?
Oui, je pense qu’elle en est capable, comme tu l’as dit, on a une stratégie d’essayer de jouer à une passe avec les avants pour resserrer les défenses, avec une animation autour d’Antoine Dupont, où on sait qu’il est redoutable près des rucks, où il va tout le temps fixer deux joueurs, s’il y a un intervalle, il va y rentrer dedans, sinon il va ouvrir des portes pour ses partenaires.
Après, comme on resserre cette défense, on fait beaucoup de jeux aux pieds, offensifs sur les diagonales, sur les ailiers, mais contre l’Italie aussi, on a été très bons dans les contre-attaques, le jeune Théo Attisogbe a été bon dans les duels aériens, donc on a récupéré beaucoup de ballons là-dessus. Cette équipe doit le faire en Irlande, ils avaient annoncé haut et fort qu’ils voulaient des trophées, c’est l’opportunité pour eux d’aller gagner en Irlande et de s’ouvrir une finale contre l’Ecosse au Stade de France.
C’est le match le plus important du deuxième mandat?
On manque d’un match référence et surtout d’une victoire hors de France, et j’espère que ça va arriver en Irlande, contre des Irlandais qui sont structurés, organisés, mais qui sont, à mon sens, moins dominants que les années auparavant. Ils ont eu du mal contre l’Angleterre à domicile pendant 50-60 minutes, ils ont été dominés. Contre des Galois, ils ont été secoués en première mi-temps.
Par contre, il va falloir être efficace dans les duels aériens, parce que là, on va avoir un combat incroyable. Il va falloir qu’on soit meilleur défensivement, on loupe trop de plaquages actuellement. C’est aussi normal, quand tu changes de jeu, quand tu vas dans un jeu plus axé sur l’animation offensive, tu passes un peu moins de temps et tu es moins appliqué sur la défense, sur l’homme. Et là, il va falloir qu’on soit très bon là-dessus, et puis après, dans la discipline, parce que les Irlandais te mettent énormément d’intensité.
Avant l’Italie, vous étiez très dubitatif sur ce banc 7-1, est-ce que vous comprenez la logique qu’il y a derrière, ou est-ce que vous trouvez ça toujours très risqué, surtout en Irlande?
Moi, je ne suis pas un adepte du 7-1. Pourquoi ? Parce qu’avoir six avants, c’est déjà énorme. Tu peux pratiquement changer un 5 de devant à la cinquantième, soixantième minute. Tu n’es pas à l’abri, au niveau international, d’avoir un, si ce n’est pas deux, trois quarts qui se blessent lors des vingt premières minutes, et avec un 7-1, si tu as deux, trois quarts qui se blessent dans les vingt premières minutes, tout ton animation offensive, tout ton jeu de lignes est perturbé. De plus, si Ntamack jouait titulaire, c’est un joueur qui n’a pas joué depuis cinq semaines, et on sait l’intensité qu’il y a. Après, Fabien Galthié est le décideur, il est payé pour ça, mandaté pour ça, donc c’est lui qui choisit, mais bon, les Sud-Africains l’ont fait. Les Sud-Africains ont été champions du monde, mais ils n’ont jamais eu deux, trois quarts blessés. Ils ont perdu contre l’Irlande à la Coupe du monde. Moi, je suis plutôt adepte d’un 6-2.
On a des joueurs polyvalents, Ramos qui peut jouer 10-15, Antoine Dupont qui peut jouer beaucoup de postes. Mais pour moi, c’est plus cohérent de faire 6 avant 2-3 quarts que de faire 7 avant 1-3 quarts. Alors après, c’est comme au poker, tu fais all-in avec une paire de deux. Si le troisième deux monte, tout va bien. Si jamais tu as deux ou trois quarts qui sont blessés ou un ou trois quarts qui n’est pas physiquement prêt pour tenir 80 minutes, eh bien, tu te mets en grand danger.
Est-ce que sur une semaine comme ça l’ambiance est plus tendue à Marcoussis?
Disons que je pense qu’il y a deux groupes. Il y a les 19 qui ont été mis au vert, qui, eux, ont pu déjà travailler en amont sur la vidéo, sur la stratégie, sur les vis-à-vis, etc. Il y a des joueurs qui ont joué dimanche soir, donc ils arrivent à Marcoussis, ils ont un peu la tête à l’envers, le corps est dans la boîte à gants, ils ont besoin de 48 heures pour récupérer.
Je pense que le niveau d’investissement, d’application, de concentration doit être optimal. Ce groupe veut gagner des trophées, ils savent que pour gagner ce tournoi d’estimation 2025, il faut aller gagner en Irlande. Je pense qu’il y a un niveau de concentration, d’application, de préparation qui est optimal.