Vous allez jouer votre dernier match à Chaban sous les couleurs de l’UBB. Comment l’abordez-vous ?
Baptiste Serin. Ca va être beaucoup d’émotion, ça commence à monter au fur et à mesure, mais j’essaie de ne pas y penser, de me concentrer sur le collectif. Mais l’émotion sera présente. C’est 10 ans qui se sont écoulés sous les mêmes couleurs… Et j’ai la chance, pour mon dernier match à domicile, de jouer avec les couleurs qui m’ont fait grandir (le maillot à damiers que portera l’UBB dimanche). C’est un beau clin d’œil pour une belle fin j’espère.
Depuis quand pensez-vous à ce dernier match à Chaban ?
Depuis que j’ai signé à Toulon, ça fait un moment… (en novembre 2018, il y a six mois). Ca a été une des grandes décisions de ma carrière, après celle qui a été de quitter Parentis (son club formateur, dans les Landes) quand j’étais jeune, pour me lancer dans le bain du rugby (au CABBG). Et là, c’est la deuxième grosse décision. Avant, j’étais sûr de ce que je faisais, je voulais continuer ici, c’était certain, c’était écrit. Là, j’ai essayé de me sortir de mon confort pour avoir de nouveaux défis. J’ai envie de finir en beauté pour passer à un autre chapitre.
Ce match face à Toulouse aurait ou être un match historique en cas de qualification. Il restera ce sentiment de petite frustration ?
Mais mathématiquement, ce n’est pas fini… Donc on va essayer de s’accrocher à cela, même si tout ne dépend plus de nous maintenant. Au-delà de l’enjeu, on veut finir en beauté devant nos supporters, nos familles, essayer d’honorer ce blason et d’honorer les Champions de France de 1969. Et j’espère que ce sera une belle fête parce qu’en plus, on joue contre Toulouse.
C’est un match pour lequel le levier affectif aura pris le dessus dans la préparation ?
On n’en a pas trop parlé entre nous. Mais au-delà de ça, on a envie de montrer qu’on est un groupe qui vit très bien, comme on l’a montré depuis pas mal de temps. On a envie de faire un gros match pour nous, pour ceux qui nous entourent, et nous ont supporté toute l’année. On aurait tous aimé avoir la qualification dès maintenant ou la jouer sur ce match, avec, peut-être, le plus beau match de l’année et quelque chose au bout. Et ce ne sera peut-être pas le cas.
Vous dîtes que le groupe vit bien. Est-ce qu’il n’aura pas vécu trop bien justement ?
(Il sourit). J’en parlerai à la fin de l’année…
Depuis trois matches (défaites contre Castres, à Toulon et à Lyon), on a l’impression que c’est dur à vivre…
C’est dur à vivre parce qu’on perd. On gagnerait 9–6 à tous les matches, je n’en aurais rien à cirer. Quand tu ne gagnes pas, tu ne prends pas de plaisir. Moi, je m’en fous de bien jouer et perdre. J’ai souvenir de ce match où tout le monde nous a critiqué après un nul contre Montpellier. Clairement, je m’en fous d’être « pourri » à regarder. Si tu gagnes, ca apporte de la bonne humeur, et, comptablement, tu es bien. La recherche du plaisir ne se fait pas en jouant bien mais en gagnant.
De ce point de vue là, vous avez évolué sur votre vision du rugby ?
Un supporter vient au stade pour voir de belles actions ou pour voir son équipe gagner ? Demandez aux supporters castrais. Leur équipe a été critiquée pour son jeu la saison dernière, mais à la fin de l’année, elle a gagné le championnat. Je n’ai pas vu non plus beaucoup de supporters bordelais venir me voir en me disant : « Baptiste, vous gagnez, mais vous êtes nuls à chier ». En revanche, ceux qui sont venus me voir m’ont dit : « Celui-là vous auriez pu le gagner… » Donc les supporters bordelais attendent que ça gagne. Certains râlent et ils ont raison, parce qu’on ne va peut-être pas se qualifier, mais ils ne parlent pas de beau jeu. Ils parlent de « qualif’ ».
C’est cet état d’esprit ce que vous allez chercher à Toulon ?
Je pars pour sortir de mon confort parce que je commençais à être dans le confort à Bordeaux et je déteste ça. Je connais tout le monde, les supporters, les coaches, le président. Avec le temps tu sais comment manoeuvrer les gens et je rentrais dans un moment où ce n’est pas bien. J’avais envie de me sentir dans ce confort là et je sais qu’à Toulon, les supporters sont en attente de résultats permanents parce que c’est aussi un public qui s’est habitué à gagner. A Bordeaux, ça s’est fait petits pas par petits pas. Les attentes sont différentes, mais, il ne fait pas trop comparer.