Pendant le Mondial U20, une expérimentation a été menée afin de réduire le nombre et la dangerosité des plaquages hauts. Avec succès !
C’est une autre réussite du récent Championnat du monde des moins de 20 ans. Si pendant toute la compétition, les plaquages hauts ont été consciencieusement épiés par les arbitres sur le terrain, ni plus ni moins que d’ordinaire, une deuxième lame pouvait sévir le lendemain de la rencontre et infliger au contrevenant un avertissement porté à son dossier. Un second durant la quinzaine occitane était alors synonyme de suspension pour le match suivant.
La menace a suffi à améliorer les comportements des joueurs dans ce domaine puisqu’aucune récidive n’a été constatée après les rares écarts. Une expérimentation très positive selon Patrice Frantschi, commissaire à la citation durant l’épreuve catalane. « World Rugby veut se débarrasser des plaquages hauts qui sont la plaie du rugby moderne. Sur ce Mondial U20, on a vu les joueurs faire de plus en plus d’efforts pour se baisser au moment de plaquer. On a même vu réapparaître les “short tackles”, des plaquages très bas qui avaient disparu », note-t-il, satisfait.
Il n’est donc jamais trop tôt pour prendre de bonnes habitudes, comme celles d’avoir les jambes fléchies et d’enserrer sa victime en dessous du sternum au moment du plaquage. Une récente étude menée par World Rugby fait ce constat amer : de trop nombreuses blessures – notamment des commotions cérébrales – naissent de ces chocs verticaux, tête contre tête, quand le défenseur ne fait pas l’effort de plier les genoux et le buste. Ce dernier multiplie alors le risque de blessure des deux joueurs par 4,3.
Un autre chiffre pourrait dissuader les habitués de ce geste à haut risque : 72 % des blessures à la tête lors d’un plaquage haut sont subies… par le plaqueur ! « Le but est de protéger les deux joueurs et de réduire ce type de blessures. On s’est aperçu que le nombre de cartons jaunes ou rouges donnés pour ce type d’action avait diminué ces derniers temps. Il fallait agir », soutient Patrice Frantschi qui, tous les lendemains de match de ce début juin, a pris place devant un écran aux côtés de ses homologues de la commission à la citation, avec une nouvelle tâche à son agenda. « Jusqu’à présent, je n’étais pas si attentif à ça. On considérait que si l’arbitre avait donné un carton jaune, la sanction était suffisante. Au Mondial U20, on a porté un regard très attentif à tous les plaquages en position verticale, sanctionnés ou pas, avec tous les angles de vue disponibles, le Hawk-Eye, les ralentis. »
L’arbitre ne peut pas tout voir ; les caméras, si. « Personne ne passe au travers », jure-t-il, lui-même arbitre au haut niveau pendant seize ans. Pendant ce Championnat du monde, la commission à la citation a distribué sept avertissements de ce nouveau genre, c’est-à-dire qui ne fait pas obligatoirement suite à une sanction de l’arbitre ou une citation de l’équipe adverse.
Une troisième manière de sanctionner un coupable de ce geste déloyal et, surtout, dangereux. Quatre situations prohibées étaient notamment dans le viseur, comme l’explique Patrice Frantschi. « C’est simple, il faut éviter tout contact avec la tête. Si le plaqueur est en position droite au moment de ce contact, il doit être sanctionné. Nous, on regarde l’incident en tant que tel, les faits, juste les faits. Trois éléments sont à prendre en compte : le point de contact, la force et la vitesse. » L’éventail des sanctions possibles s’est donc étoffé, pour le bien des joueurs et du jeu, ce qui leur a été expliqué avant le début de l’épreuve et accepté de tous. La règle en elle-même n’a pas changé. Pas encore.
Utile pour le rugby de demain
Une autre expérimentation, toujours en U20, aura lieu lors du prochain Trophy, le Championnat du monde de la deuxième division, à la fin de l’été en Roumanie. La ligne du plaquage haut sera abaissée au « mamelon », selon World Rugby. « Je préfère au sternum, rigole Joël Dumé, Directeur technique national de l’arbitrage. Là, ça touchera l’arbitre directement. Cette expérimentation, on l’a déjà faite en France, au niveau des catégories jeunes notamment. » Le nombre de pénalités sifflées pour un plaquage haut a explosé au même rythme que les commotions cérébrales.
Prévenir les blessures, surtout à la tête, et modifier les comportements, surtout sur cette phase des plaquages hauts : les objectifs de ces expérimentations estivales sont clairs et précis et semblent avoir été remplis en Occitanie. Il en sera sans doute de même en Roumanie. Et après ? « On ne sait pas encore ce que ça va devenir, mais tout ça va être utile pour le rugby et les joueurs de demain. Au Mondial U20, on a vu très peu de plaquages hauts, bien moins que d’habitude en tout cas », apprécie Patrice Frantschi. Quand une expérimentation est un succès, en général, elle de- vient ensuite la règle
CE QUE DIT LA RÈGLE DE L’EXPÉRIMENTATION
L’avertissement pour plaquage haut est appliqué dans l’un des quatre cas suivants :
Toutes les pénalités de contact élevé, quelle que soit la sanction pendant le match
Tous les plaquages nécessitant un protocole commotion, que ce soit à l’encontre du porteur de balle ou du plaqueur
Les plaquages hauts qui sont manqués en cours du match
Les contacts tête-tête ou épaule-tête évidents ou accidentels