La Champions Cup et le Challenge européen se poursuivent ces vendredi 15, samedi 16 et dimanche 17 décembre. Parmi les clubs français, La Rochelle jouera la deuxième journée de Coupe des champions à 10.000 kilomètres de Marcel-Deflandre… en Afrique du Sud. Depuis la saison dernière, les franchises sud-africaines ont rejoint nos compétitions continentales. Entre aberration écologique, défi logistique et quête de nouveaux revenus pour la compétition, les acteurs du rugby français sont partagés.
Le Stade Rochelais va devoir relancer sa saison européenne après une défaite inaugurale à Marcel-Deflandre contre son rival irlandais du Leinster (9-16). Les doubles champions d’Europe en titre ont passé la semaine à 10.000 kilomètres de La Rochelle. Ils affrontent ce samedi (14h) les Stormers du Cap en Afrique du Sud.
Les hommes de Ronan O’Gara ont dû embarquer pour un long voyage en avion dès lundi, au lendemain de leur choc contre le Leinster, pour une semaine en Afrique du Sud avant leur match au Cap. Un voyage long et fatigant: un bus de La Rochelle à Bordeaux, un avion pour faire Bordeaux-Paris, puis Paris-Johannesburg et enfin Johannesburg-Le Cap. Arrivée sur place mardi soir.
Mais dans l’encadrement ou chez les joueurs, personne ne se plaint.
Romain Carmignani, coach de la défense:
“On a voyagé dans de bonnes conditions, la qualité de l’accueil est top. On s’est entraîné mercredi après-midi après une bonne récupération. Il fait bon, 25 degrès, on ne va pas se plaindre.”
Reda Wardi, le pilier international, voit même du positif à ce long périple:
“Oui le voyage était un peu long mais on a bien rigolé entre nous dans l’avion. On en a profité pour passer des moments ensemble pour se resserer avant de disputer ce match décisif.”
Cela fait déjà un an que les franchises sud-africaines ont intégré la Champions Cup et le Challenge européen. Depuis 2017, certaines équipes d’Afrique du Sud ont même intégré le Pro14 (ligue réunissant les provinces galloises, irlandaises, écossaises et italiennes), désormais appelé United Rugby Championship.
Il y a un an, Philippe Saint-André, entraîneur de Montpellier à l’époque, était surpris par cette décision. Un an plus, il n’a toujours pas changé d’avis:
“C’est une hérésie. D’abord sportivement, je ne suis pas sûr que cela apporte une plus-value. Financièrement, je ne suis pas sûr non plus loin de là. La cohérence sportive n’est pas bonne. Et en plus, on est dans une période où on parle beaucoup de réchauffement climatique de CO2, je ne suis pas sûr que le rugby soit un bel exemple en ayant invité l’Afrique du Sud.”
Un sentiment partagé par le pilier du Stade Français Clément Castets, engagé pour l’environnement:
“Il y a des équipes qui ne font pas parties de l’Europe qui vont jouer la Coupe d’Europe qui font faire des milliers de kilomètres en avion, si nos dirigeant ont trouvé ça pertinent, bah ma fois je le laisse à leur bon jugement, il a l’air très bien, très high level.”
Des déplacements en avion polluants et aussi plus coûteux pour les clubs. L’EPCR, l’organisateur de la Coupe d’Europe, donne une compensation financière aux équipes qui doivent faire ces longs déplacements. Les Cheetahs, franchise de Bloemfontein, au centre de l’Afrique du Sud, a décidé dès la saison dernière de disputer les rencontres de sa poule en Europe (ils étaient basés en Italie lors du Challenge européen).
Une aubaine financière
L’intégration des équipes sud-africaines répond avant tout à la recherche de nouveaux revenus pour les compétitions européennes, assume le directeur général du Stade Français Thomas Lombard:
“Il faut prendre en compte le contexte économique parce que l’économie des clubs dépend en grande partie des droits télé du championnat et de la Coupe d’Europe. C’était une opportunité pour nous de maintenir un certain niveau de revenus en ce qui concerne les droits TV, d’augmenter la compétitivité puisque les Sud-Africains – on est bien placés pour le savoir – sont les meilleurs au monde. Après ça pose des questions de logistique, de transports et d’emprunte carbone. On l’a vécu la saison dernière, on a joué un match à Johannesburg. Maintenant j’ai envie de vous dire que ce sont des vols réguliers. Qu’il y ait le Stade Français ou pas à bord, les avions décolleront. On ne vient pas rajouter sur une empreinte carbone qui existe déjà.”
Se pose, pour finir, la question de l’équité sportive. Depuis l’intégration des franchises sud-africaines, aucun club européen ne s’est imposé dans l’hémisphère sud. Ce qui n’est pas surprenant pour Saint-André:
“Il n’y a pas de décalage horaire c’est vrai mais si tu joues à Pretoria par exemple, tu vas jouer en altitude et pour des joueurs qui s’entraînent au niveau de la mer, il faudra arriver dix jours en avance pour s’adapter à l’altitude.”
Sans parler des écarts de température. La Rochelle a joué sous un déluge dimanche contre le Leinster et se retrouve avec des conditions estivales cette semaine. Il faut donc passer d’un rugby d’hiver à un rugby d’été. Mais les double champions d’Europe n’ont pas le choix. Pour pouvoir défendre leur titre, ils vont devoir réaliser l’exploit.
Via RMC Sport