Le deuxième ligne international Français Paul Willemse s’est longuement confié via L’équipe pour évoquer le carton rouge qu’il a écopé contre l’Irlande, vendredi dernier au Stade Vélodrome de Marseille.
Dans un premier temps, ce-dernier indique aller mieux.
Il l’explique : ce n’est que du rugby. Il relativise et dédramatise. Extrait:
Ça va mieux. Je suis à la maison, avec ma femme, mes enfants, donc ça m’aide à relativiser. Ce n’est que du rugby, il y a beaucoup plus grave dans la vie. Mais, évidemment, ça n’enlève pas ma responsabilité et ma culpabilité. Je sais que si ça n’a pas marché sur ce match, c’est à cause de moi. J’ai commis ces deux erreurs et c’est encore plus frustrant car je me sens très bien sur le début de match. J’ai fait dix plaquages en 21 minutes sur le terrain, j’étais dedans quoi.
Il revient ensuite précisément sur son premier carton jaune. Extrait:
Il y avait un potentiel gratteur en face (Andrew Porter), je suis arrivé au soutien offensif de Matthieu Jalibert. Le but, c’est d’enlever cette menace de la zone de ruck. Malheureusement, je n’étais pas dans la meilleure position et tout se passe très mal ensuite. Je lui touche la tête. Quand l’arbitre demande la vidéo, je comprends… Je sors avec le stress du bunker qui peut transformer le jaune en rouge.
En revenant sur la pelouse dix minutes plus tard, il décide de ne pas baisser le rythme ni l’agressivité. Il explique pourquoi. Extrait:
J’ai un choix à faire. Soit je me dis “Paul, tranquille, fais attention”. Mais qu’est-ce que ça veut dire ? Donc dans ma tête, c’est plutôt “continue comme tu as fait, tu as eu une situation bizarre mais il faut rester le même dans l’engagement”. Si je commence à avoir peur, autant laisser tomber le match. Donc je repars sur le terrain avec le même état d’esprit, la même envie de gagner mes duels. Et là, malheureusement…
Il revient ensuite sur son deuxième carton jaune qui s’est transformé en rouge au cours du bunker. Extrait:
Je l’ai connue 1 000 fois, 2 000 fois dans ma carrière celle-là aussi. Paul Gabrillagues plaque (Caelan) Doris. Il est aux jambes, Doris travaille avec ses jambes et s’est libéré les bras. Donc je dois intervenir et il a ce mouvement de tête, une fois en haut, une fois en bas. Je ne sais pas où va être sa tête au moment du contact, ce sont des situations qui vont très vite. J’arrive un peu haut mais avec mes genoux très bas. À chaud, j’ai l’impression que le contact est au niveau de son épaule mais il y a ce mouvement qui monte et ça touche la tête. Avec cette vitesse-là, dès que je vois l’image sur l’écran, j’ai compris.
Paul Willemse estime qu’il s’agit simplement de deux accidents, des faits de jeu malheureux. Extrait:
Oui. Dans le rugby international, il faut toujours être à la limite. Les équipes trop propres, elles ne gagnent rien. Regardez l’Afrique du Sud, la Nouvelle-Zélande et même l’Irlande, elles jouent toujours à la limite pour obtenir des succès. Vous ne pouvez pas être 100 % propre et avoir peur de faire des fautes. Tout se joue sur des petits détails qui m’ont fait défaut sur ces situations. Ça n’a jamais été un problème dans ma carrière, je ne suis pas un mec méchant, qui fait mal gratuitement. J’étais juste en train de faire mon job.
Le deuxième ligne explique ne pas vraiment voir ce qu’il aurait pu changer techniquement sur ces deux situations. Extrait:
Avec toute mon expérience sur les plaquages et les déblayages, je ne vois pas… (il ne termine pas sa phrase). Peut-être que sur la deuxième situation, je peux me baisser un peu plus. Des décisions comme ça, on en prend une centaine par match. Pourquoi ça s’est mal passé ? Parce que le scénario a changé et je n’ai pas réussi à m’adapter.
Bien évidemment, il regrette la situation, lui qui se faisait un plaisir de renouer avec les Bleus. Extrait:
Ce match était une opportunité de fou pour moi. J’ai raté la Coupe du monde sur blessure (déchirure à une cuisse ; il avait aussi raté le Mondial 2019 sur blessure), je ne suis pas dans la première liste pour le Tournoi et on m’appelle après un forfait (celui d’Emmanuel Meafou). J’étais vraiment chaud ! J’avais une deuxième chance. Et là, tout s’écroule.
Tout revient dans ma tête. Tu te dis “mais, oh, c’est une blague ou quoi ? Ça ne peut pas être vrai.” Ça ne m’est jamais arrivé dans ma carrière et ça arrive sur ce match. Pas sur un match amical. J’enchaînais les galères depuis le Grand Chelem (en 2022), je rate encore une Coupe du monde à cause d’une blessure, je reviens et il se passe tout ça.
Il concède s’en vouloir d’avoir laisser ses 14 partenaires “galérer” sur la pelouse. Extrait:
C’était un match tellement important pour cette équipe après la déception de la Coupe du monde (défaite en quarts contre l’Afrique du Sud, 28-29). Je me sens très coupable, je m’en veux pour les 14 mecs sur le terrain qui galèrent à cause de moi. J’ai pris sur moi sur le banc, en me disant d’accepter la chose et de prendre mes responsabilités à 100 %. Je ne vais pas me cacher.
Pour se remonter le moral, il est allé faire un barbecue chez Bernard Le Roux. Il a ensuite dédramatisé la situation. Extrait:
Quand j’ai quitté le groupe, j’avais l’impression que je n’étais rien. Le samedi soir, quand on a été libéré de Marcoussis, je suis allé faire un barbecue chez Bernard Le Roux (qui évolue au Racing 92). Ça fait toujours du bien, un barbecue ! (rires) J’ai fait face à tout le négatif puis après, je suis obligé de regarder le positif. Avant d’être un joueur de rugby, je suis un homme, un mari, un père de famille. Je suis rentré chez moi, la santé est là, tout le monde va bien… Si je ne vois ma vie que par le prisme de ma carrière dans le rugby, je tombe en dépression.
Pour conclure, Paul Willemse explique espérer pouvoir rejouer à nouveau avec l’équipe de France. Il ne veut surtout pas terminer sa carrière internationale d’une telle manière. Extrait:
Pour moi, c’est toujours la fierté suprême dans ma carrière de porter le maillot de l’équipe de France. Ça ne changera jamais. Il me reste quelques années devant moi et pour le futur proche, je me sens en bonne forme pour continuer au niveau international malgré les sacrifices que ça demande, notamment mes absences auprès de ma femme et de mes quatre enfants. Si ça n’arrive plus, ça ira. Attention, je ne dis pas que je le prendrais bien car je suis un compétiteur qui veut encore jouer des matches de haut niveau.
Là, ce n’est pas une blessure physique, mais une blessure mentale. Là aussi, il faut faire de la rééducation, reprendre confiance pour éviter de douter sur mes prochains plaquages. Si j’ai trop de questions dans la tête, je ne vais pas m’en sortir.