C’est officiel : Antoine Erbani va quitter le SU Agen à la fin de la saison.
Il va d’ailleurs mettre un terme à sa carrière au mois de juin prochain à l’âge de 34 ans.
Lors d’un entretien accordé à Sud-Ouest, le joueur Agenais a expliqué sa décision. Extrait:
C’est un peu étrange, mais il fallait bien que ça arrive un jour ! La décision était prise depuis un moment, mais c’était une façon de marquer un peu le coup et de prévenir les gens que je n’avais pas encore eu le temps de prévenir. Et l’occasion aussi de recevoir des messages sympas…
Pourtant, il possédait une année optionnelle supplémentaire dans son contrat. Mais il ne regrette rien. Extrait:
Honnêtement, ça s’est fait comme ça et ça ne sert à rien de penser à ce qui aurait pu se passer. La situation est comme ça, de toute façon, il faut bien arrêter un jour. Ce qui me déçoit, c’est que la saison n’est évidemment pas comme on l’avait tous espérée. Mais des mauvaises saisons, j’en ai connues, on en a tous connues. Donc ça fait partie du jeu. On est hors de danger, c’est déjà un bon point de ne pas finir la saison en ayant peur de descendre, ça aurait été le pire. Mais il fallait bien que ça s’arrête un jour.
Déjà, je ne vis pas avec les regrets, je ne suis pas comme ça. C’est le meilleur moyen d’en avoir de penser à ce qu’on aurait pu faire. Mon truc à la base était de jouer pour Agen. Ce rêve-là a été outrepassé. En être le capitaine du SUA, vivre une montée en Top 14 et un maintien, c’était déjà inespéré pour moi. Je sais quel est mon niveau, je tenais la route, mais je ne vivais que par le groupe aussi. J’étais très fier de ça. Évidemment j’aurais aimé ne pas partir de Pau, la saison à Biarritz ne s’est pas bien passée non plus, et j’aurais aimé finir mon contrat à Agen. C’est la vie, ça ne se déroule pas tout le temps comme prévu. Je ne garderai pas de regrets, mais juste ce qui a bien fonctionné.
Il regrette cependant de ne pas pouvoir jouer les phases finales avec Agen. Extrait:
On essaie tout le temps d’envisager les scénarios les plus sympas. Pour tout le monde, ça aurait été bien de jouer des phases finales. Mais on a compris dès le début que la saison serait très compliquée. Donc on a dû assez vite oublier ce scénario-là. On fait tout le temps du mieux qu’on peut. Là, dès le début, et pour plein de raisons, la saison a été délicate. Il faut la terminer dignement.
Il ne réalise pas encore qu’il arrêtera réellement sa carrière en fin de saison. Extrait:
Honnêtement, je ne réalise pas trop encore que tout ça va s’arrêter. Je suis encore en train de me dire qu’il faudra que je fasse un bon Bronco test à la rentrée [NDLR : il permet de mesurer l’endurance aérobie et l’état de forme des joueurs], alors que je ne le ferai pas ! Je ne réalise pas encore…
Ça va venir, parce qu’il va y avoir des moments importants dans les prochains jours. Mais la déception et la tristesse sont importantes, c’est quand même la fin de quelque chose. Je reçois pas mal de marques d’affection et de messages très sympas qui me font dire que j’ai dû faire quelques trucs de bien. Donc ça me rend fier. Et puis j’aurais difficilement pu imaginer les moments que j’ai vécus. Je vais réaliser petit à petit ce qu’on a accompli.
Il fait ensuite un point sur sa carrière. Extrait:
Mes trois années à Pau ont été délicates rugbystiquement et ça ne s’est pas passé comme je l’aurais souhaité à Biarritz, mais j’en garde des souvenirs inoubliables aussi. Je suis riche des gens que j’ai rencontrés. Au final, à la fin du rugby, il ne restera que des moments vécus et des personnes. Je n’ai aucun regret. On est parti un peu tous en même temps d’Agen en 2018, mais on laissait le club entre de bonnes mains. À rester, je me serais fait plus de mal qu’autre chose, j’aurais sûrement régressé et ça n’était pas possible pour moi. Je voulais vraiment partir au top.
Le souvenir que j’ai en tête, c’est le tour du stade Chaban-Delmas à la fin de l’échauffement avant la finale d’accession à Bordeaux contre Montauban en 2017. Il y a beaucoup d’Agenais qui m’en parlent encore dans la rue. Il s’est passé quelque chose à ce moment-là. Je n’arrivais presque plus à respirer, il y avait une chaleur et une intensité incroyable avec 35 000 personnes, dont tout Agen ! On était tous regroupés, on est passé devant le virage avec nos supporters, Mathieu Blin (le manager de l’époque) marchait quelques mètres devant nous, il avait des larmes énormes qui coulaient sur son visage. J’aurai du mal à l’oublier. Il m’a regardé, on s’est compris. Ce n’était presque pas la peine de jouer ce match, c’était impossible pour nous de passer à côté ! Je le dis très modestement parce que ça n’a pas été si facile que ça (41-20).
Il parle ensuite de ses plus mauvais souvenirs. Extrait:
Ce sont les descentes avec Agen qui comptent aussi ou les finales perdues. Il y a également les blessures… Il y a beaucoup de mauvais moments à passer dans une vie de rugbyman. Mais je préfère les oublier. Ils ont servi à me construire, mais je retiendrai quand même surtout les bons moments.
Il veut désormais profiter de ses deux derniers matches. Extrait:
Des matches, j’en ai joués un paquet. Je veux profiter de ce qui se passe autour maintenant. Je sais que tout sera différent après, tout va changer. Donc je vais profiter de chaque moment que je peux prendre encore ici. Et je suis persuadé qu’il y a plein d’autres choses à faire après ce rugby. Je me lancerai à fond dans la suite, mais je veux d’abord finir cette vie-là. Tous les moments qui arrivent vont compter et rester. Comme le dernier match à Armandie, il faut s’y préparer.
Questionné sur son avenir, il se confie. Extrait:
« Ce que j’ai en tête, c’est de travailler avec mon frère Victor et mon père Dominique dans l’entreprise familiale de commerce d’alcool. Ça va être ça mon quotidien. Je vais d’abord passer un bel été parce que ça fait un moment que je n’ai pas passé un vrai été sans me préoccuper de la reprise de l’entraînement. Donc je vais bien en profiter. Et après je sais que mon frère m’attend pour travailler. Je serai stagiaire au début, je vais le suivre quelque temps et puis ce sera un travail de commercial. Je vais apprendre le métier et j’espère que je pourrai ensuite voler de mes propres ailes. »
Il pourrait poursuivre le rugby en amateur. Extrait:
« À Pont-du-Casse, il y a une pression populaire, ça doit faire dix ans déjà qu’ils veulent que j’aille jouer là-bas. Jouer avec le petit frère, ça pourrait être sympa. Mais je me surprends parfois à en avoir marre du rugby. C’est un bon signal pour dire qu’il y en a eu assez.
C’est très frais. Pour l’instant, je suis en train d’encaisser le fait que je ne serai plus un joueur d’Agen. Mais franchement, j’en ai assez mangé du rugby, donc j’ai envie de faire et de voir autre chose. Aujourd’hui, rechausser les crampons à Pont-du-Casse, je n’en ai pas envie. J’ai eu des retours des mecs qui ont arrêté avant moi, c’est très difficile comme arrêt. Il ne faut jamais dire jamais, mais je n’en ressens pas le besoin pour l’instant. »