Les mots sont glissés sur un ton calme et avec une pointe d’avertissement par Ugo Mola, entraîneur du Stade Toulousain – sacré pour la deuxième année de suite Meilleur staff du Top 14 à la 20e Nuit du Rugby lundi 23 septembre.
Ces mots concernent l’un de ses joueurs phares, Antoine Dupont, qui a décroché au cours de la même cérémonie un troisième trophée de Meilleur joueur du Top 14 pour la saison dernière, ainsi que pour la deuxième fois le doublé avec Meilleur International Français.
Ugo Mola a d’abord loué « la chance d’entraîner un extraterrestre » avant de se faire plus énigmatique. « Peut-être que vous n’êtes pas à l’abri d’avoir encore tout vu et j’espère qu’il aura cette passion qui l’anime depuis qu’il est gamin pour fédérer et pour être capable, au-delà de sa personne, d’être le porte-drapeau d’un sport collectif et pas individuel. »
Alors qu’Antoine Dupont a désormais l’habitude de braquer les projecteurs sur lui, la lumière n’inonde pas nécessairement ceux qui l’entourent. Ce qui avait d’ailleurs agacé les joueurs de l’équipe de France de rugby à sept qui s’échinaient depuis des années sur le circuit mondial sans que l’on en parle, au moment où les médias n’avaient d’yeux que pour Antoine Dupont.
Le demi de mêlée du Stade Toulousain en a plus que quiconque conscience et compte sur sa notoriété pour justement inverser la tendance. Car s’il brille, c’est grâce aux autres. S’il performe si bien, ce n’est pas que grâce à lui-même (un peu beaucoup quand même, mais bon…).
« Quand j’étais petit, je regardais mes idoles. De me dire que maintenant je représente ça pour certains enfants, c’est très dur à se projeter », confiait-il en marge de la 20e Nuit du Rugby à l’Olympia.
« Mais quand on l’entend dire de certains parents, de certaines personnes que ça les pousse à regarder le rugby, que ça pousse les enfants à se mettre à jouer, c’est quelque chose que je n’aurais jamais pu imaginer de pouvoir inspirer ça à des jeunes. Là on se rend compte aussi de l’image et de ce qu’on peut représenter pour les jeunes générations et ça nous pousse aussi à être exemplaires. »
Qu’il soit considéré par son entraîneur comme « un extraterrestre » le fait rire. « C’est plutôt bon signe quand ils le disent dans leur vocabulaire. Je prends ça comme un compliment évidemment », sourit-il avant de vite vouloir effacer cette nouvelle mise en lumière de sa personne.
« Mais encore une fois, dans les équipes dans lesquelles je joue, j’ai des joueurs extraordinaires autour de moi, que ce soit Toulouse, que ce soit avec l’équipe de France. On a vu des joueurs avec l’équipe de France à 7 que personne ne connaissait qui se sont révélés être des athlètes et des joueurs de rugby incroyables, qui ont eu un coup de projecteur et une lumière sur eux qu’ils méritaient mais qu’ils n’avaient pas depuis plusieurs saisons. Si j’ai pu permettre ça, tant mieux, mais c’est aussi grâce à eux, évidemment. »
Ugo Mola rappelle l’alignement des planètes et le travail collectif réalisé en amont pendant de longs mois pour créer un environnement propice et vertueux permettant à Antoine Dupont de performer, notamment lors des Jeux olympiques de Paris 2024.
« Le pari a plus fait parler au moment où il s’est engagé que réellement l’inquiétude qui nous habitait ou nous concernait parce qu’on savait qu’il en avait la capacité et il y avait juste de la gestion assez saine à réaliser », dit-il.
« Merci à Antoine de s’être lancé dans ce projet-là avec l’aide de Christophe Reigt (manager de France 7, ndlr) et Jérôme Daret (entraîneur de France 7, ndlr) qui étaient les précurseurs de cette idée-là. Bernard Laporte aussi en son temps qui a beaucoup insisté pour qu’Antoine puisse faire ça. Le résultat est là. Il y a plein de personnes qui se sont mises en ordre de marche : la fédération, la Ligue, le Stade toulousain et ça a donné ce que vous avez vu pour les JO. Tant mieux pour lui et pour l’ensemble du rugby français. »
Actuellement au repos suite à une saison spectaculaire qui s’est conclue avec une médaille d’or olympique, Antoine Dupont devrait revenir début octobre sur les terrains avec son club. En attendant, il vient de se faire retirer les plaques qu’il avait au visage pour consolider sa pommette suite à sa fracture maxillo-zygomatique après un choc violent contre le trois-quarts centre namibien Johan Deysel en match de poule de la Coupe du Monde de Rugby 2023.
Via Rugby Pass