Julien Perpère, Président des Fils de Besagne, groupe de supporters du RCT, nous a accordé une longue interview où il revient sur l’évolution du supportariat rugby et celle de son club ces dernières saisons, sans langue de bois !
Julien, pouvez-vous nous présenter l’association des Fils de Besagne ?
C’est une association qui a fêté ses 10 ans en 2017 et qui 625 adhérents. Nous avons 3 axes de développement : encourager son équipe à domicile : cela se traduit avec des animations en tribune. On est également présents à l’extérieur, on les encourage loin de Mayol, même à l’étranger. Et le dernier axe de notre association c’est : regrouper nos adhérents afin de partager notre passion à plusieurs.
Comment arrive-ton à suivre financièrement son club dans toute la France ?
Être supporter, cela a un coût, les déplacements coûtent de l’argent. En tant que club de supporters, nous essayons toujours de proposer le déplacement le moins cher possible. Nous finançons entre 15 et 20 euros de déplacement par personne. Les prix des péages et du carburant augmentent, les prix des places également. Se déplacer aujourd’hui coûte plus cher qu’il y a 10 ans. Cela coûte de l’argent, c’est un investissement. Le club et les instances ne s’en rendent pas toujours compte.
Les plus fervents supporters ont changé de tribune à cause des prix
Quelles sont vos relations avec la direction du RCT ?
On a des relations régulières, nous avons un référent qui s’occupe de nous. On a des réunions avec la direction du club tous les 3 ou 4 mois, sauf quand on sollicite un contact avec le club.
A Toulon, les supporters sont très importants dans l’économie du club. Êtes-vous impliqué dans des décisions sur l’avenir du club ?
C’est ce que l’on peut reprocher au club : le manque de communication envers ses supporters. Nous sommes peu ou pas sollicités lorsque le club prend une décision. Lorsque Mourad Boudjellal est arrivé à Mayol à l’époque, il a augmenté fortement le prix des places. Nous lui avions expliqué que cela ne nous semblait pas forcément judicieux, nous avons tiré la sonnette d’alarme mais il a appliqué ce qu’il souhaitait appliquer. On aimerait être un peu plus écoutés parfois.
Ce changement de tarification a-t-il eu une répercussion sur le type de population ?
C’est une évidence. A Toulon, c’est particulier. Avant Mourad Boudjellal, le RCT était très loin du professionnalisme, géré de manière amateure. Mourad Boudjellal a structuré le club, c’est une vraie entreprise désormais, on peut le remercier pour ça. Dans son business plan, il y avait une augmentation des prix des places et des abonnements et évidemment, cela a eu des répercussions. Les gens qui venaient en famille ne viennent plus et sont remplacés par des gens qui viennent à Mayol parce que c’est devenu “The Place To Be”. L’évolution se ressent en tribune. Avant, la tribune qui regroupait les plus fervents supporters était la tribune Bonus, qui est une tribune latérale. Vu que cette tribune a monté en gamme, ces gens-là ont migré derrière les poteaux à cause des prix. Et la problématique, si l’on va plus loin, c’est que les nouvelles personnes sont venues parce que le club a tout gagné entre 2011 et 2015. Depuis que cela va un peu moins bien, ces gens ne viennent plus. Du coup, cela fait plusieurs mois, plusieurs saisons même, que Mayol a des difficultés à être à guichets fermés. Mourad Boudjellal est en train de revoir les tarifs à la baisse pour faire revenir un peu de ferveur et de monde. Les affluences restent belles mais nous ne sommes plus à guichets fermés. Il aurait peut-être dû nous écouter il y a 10 ans lorsque nous l’avions alerté.
Si l’on devait choisir un chouchou de Mayol actuellement ? Mathieu Bastareaud
Dans un rugby devenu professionnel, la proximité entre les supporters et les joueurs existe-t-elle encore ?
Cela a évolué. Les jours de match, ils sont dans leur préparation avant la rencontre, puis ils assurent la partie “business” après la rencontre avec les partenaires… Cela devient difficile mais pour autant on a la chance d’avoir des entraînements ouverts au public toutes les semaines. Les joueurs s’arrêtent pour signer des autographes et discuter. En tant que club de supporters, nous avons la chance d’avoir 3 parrains, avec lesquels nous avons des relations privilégiées. Il y a des joueurs avec lesquels des liens se sont tissés, comme Maxime Mermoz, Alexis Palisson, Alexandre Menini… Mais d’une manière générale, aller discuter avec un joueur du RCT, ce n’est pas chose aisée, même si on n’en n’est pas encore comme au football.
Quels sont les chouchous de Mayol aujourd’hui ?
Je ne sais pas aujourd’hui… Il y a eu Johnny Wilkinson, Matt Giteau à l’époque… Je n’aime pas mettre un joueur en avant par rapport à un autre. Si l’on devait en donner un aujourd’hui, je pense qu’un Mathieu Bastareaud est énormément apprécié à Toulon.
Les médias ont beaucoup parlé de la violence du rugby ces derniers mois, les supporters sont-ils inquiets sur ce sujet ?
A Toulon, on aime le combat, donc forcément ça nous plaît quand il y a de l’engagement. On se rend tous bien compte que le rugby d’il y a 15 ans n’a plus rien à voir avec le rugby d’aujourd’hui. On regarde certains gabarits de l’époque et on se dit qu’aujourd’hui, ils n’auraient plus leur place dans les équipes. On est conscients que c’est de plus en plus violent et agressif mais honnêtement, les adhérents ne s’en plaignent pas. Cela doit rester un sport d’engagement et de combat. Le Toulon qui est allé en finale l’an passé était comme cela : les trois quart n’ont pas beaucoup vu le ballon, cela se passait beaucoup devant.
“Niveau transferts, on sait avec Mourad Boudjellal que tout est possible !”
Quel parcours imaginez-vous cette saison pour le RCT ?
C’est compliqué à dire. Je pense que l’on a une bonne équipe sur le papier mais un nouveau staff, de nouveaux joueurs. On voit du très bon et du très mauvais, souvent dans un même match. Je crois beaucoup en ce nouveau staff, qui est compétent et qui va réussir. Je pense que ce n’est pas prétentieux de dire que l’on doit être dans les 6. Après, en barrages, tout peut aller vite, on l’a vu par le passé, ce n’est pas forcément le meilleur de la phase régulière qui est champion. L’an dernier, jamais je ne vous aurais dit que Toulon serait en finale, mais on y est arrivés en battant La Rochelle qui avait été meilleur sur la saison régulière.
En conclusion, si vous deviez choisir un ou deux joueurs, n’importe lesquels, pour signer à Toulon, qui choisiriez-vous ? On passera le message à Mourad Boudjellal.
Je pense que devant, il nous manque des piliers de très haut niveau. Quel joueur en particulier, c’est compliqué. On a des lignes arrières très bonnes, une charnière prometteuse, mais devant… Des gens comme Bakkies Botha, Carl Hayman n’ont pas été remplacés sportivement et dans le charisme. Il faudrait arriver à trouver des joueurs de ce calibre même si ce n’est pas évident. Mais on sait qu’avec Mourad Boudjellal, tout est possible !