Alors qu’il était initialement suspendu quatre semaines après son expulsion face à l’Afrique du Sud, Antoine Dupont a vu sa peine réduite de moitié en appel. Comment le comité indépendant qui a statué sur son cas a-t-il pris cette décision ? Qu’est ce qui a motivé ce choix ? Explication sur un cas qui va faire jurisprudence.
L’appel a été gagnant. Alors qu’un risque d’aggraver la sanction existait, la Fédération Française de Rugby, en accord avec le Stade Toulousain et le joueur, a choisi la semaine dernière de faire appel des quatre semaines de suspension infligées au demi de mêlée international Antoine Dupont pour son carton rouge reçu face à l’Afrique du Sud au stade Vélodrome. Il s’agissait de s’engouffrer dans une brèche au regard de l’action précise de l’expulsion.
Car elle entrait dans le cadre de la Loi 9.17 de World Rugby, à savoir, “un joueur ne doit pas plaquer, faire une charge, tirer, pousser, ou saisir un adversaire dont les pieds ne touchent pas le sol”. Mais un détail venait changer la donne: le joueur touché, en l’occurrence Cheslin Kolbe, était retombé directement sur la tête. Ce qui changeait tout et impliquait de se référer à une faute du joueur pour “contact à la tête”.
Hors, dans ce cas, la directive de World Rugby depuis plusieurs années était un point d’entrée moyen de la sanction, quelle que soit la nature du contact avec la tête (tête contre tête, tête contre sol…). Résultat, le comité infligea donc à Dupont ce point d’entrée moyen (8 semaines) réduit de moitié (4 semaines pour bon comportement, excuses, remords, casier vierge). Mais les observateurs s’étonnaient que l’intentionnalité, nulle ici, n’ait pas été jugée.
L’auteur de la directive, l’avocat anglais Christopher Quinlan, a souhaité lui-même présider le comité jugeant l’appel de Dupont. En compagnie de Nigel Hampton KC, le président du comité judiciaire de la NZRU (Fédération Néo-Zélandaise) et président du comité judiciaire de la SANZAAR (qui regroupe les fédérations sud-africaine, néo-zélandaise, australienne et argentine) et Adam Casselden, l’ancien président du comité d’examen des fautes de la SANZAAR, ils ont choisi de modifier la loi. Et de finalement juger que si le plaquage d’un joueur en l’air n’était pas volontaire, il ne fallait pas obligatoirement s’obstiner à avoir un point d’entrée moyen de la sanction.
C’est exactement ce qu’il s’est passé pour Antoine Dupont. Les images sont claires, le joueur français n’a pas vu arriver Kolbe dans les airs et n’a donc pas pu l’éviter. Partant de ce constat, le comité a choisi le point d’entrée faible de la sanction (4 semaines), réduite de moitié pour les raisons évoquées plus haut (2 semaines). Rien n’empêchera, selon les conséquences physiques sur le joueur touché notamment (sur ce cas précis Kolbe a rejoué la semaine suivante), de prendre un point d’entrée de sanction plus haut (8 semaines, 12 ou plus). Mais les personnes qui jugeront à l’avenir ce genre d’action auront la liberté de placer le curseur là où ils l’estiment le plus juste quand la faute est involontaire.