Les commotions cérébrales sont de plus en plus nombreuses dans les matchs de rugby. On en compte près d’une sur trois matchs en Top 14 et leur récurrence peut avoir de graves conséquences neurologiques. À Paris, des spécialistes ont mené une expérimentation sur une cinquantaine de joueurs de rugby et les premiers résultats sont prometteurs.
Pour le milieu médical, c’est le fléau du rugby. “La commotion cérébrale, c’est une altération des fonctions neurologiques qui survient à la suite d’un impact transmis au cerveau, un ‘tête-contre-tête’ par exemple”, définit Jean-François Chermann, neurologue. KO, perte de mémoire, vertiges, troubles de la vision… Nombreux sont les symptômes témoignant d’une commotion.
Commotions trop rapprochées: danger
Et si la plupart d’entre elles régressent au bout de quelques heures, il existe aussi des cas où les symptômes persistent plusieurs jours, comme l’explique le Dr Chermann.
“Ça peut se transformer en fatigue, maux de tête, troubles de l’humeur”, détaille le praticien.
Problème: il n’existe à ce jour aucun traitement contre les commotions cérébrales. Pire, nombreux sont les joueurs de rugby à en resubir, la précédente n’étant pas encore “passée”. “Actuellement, on se demande si les commotions répétées peuvent engendrer une pathologie neurodégénérative”, explique Jean-François Chermann.
Steve Thompson, ancien talonneur du XV de la Rose, peut en témoigner. Si la date du 10 octobre 2003 est gravée dans la légende du sport anglais, lui n’en garde aucun souvenir, comme il le confiait en 2020 au Guardian. Et pourtant, ce 10 octobre 2003, il soulevait la coupe Webb-Ellis avec l’équipe d’Angleterre sous les yeux de la planète rugby. Un trou noir total, causé par une maladie neurodégénérative grave: l’encéphalopathie chronique post-traumatique, causée par les très nombreux chocs accumulés au long de sa carrière.
La lumière infrarouge, la solution miracle?
Il n’existe à ce jour aucun traitement officiel mais la lumière au bout du tunnel, Jean-François Chermann commence à l’apercevoir. À l’hôpital Georges Pompidou de Paris, le neurologue a mené pendant plus d’un an, avec Philippe Malafosse, médecin du sport au Montpellier Hérault Rugby, une expérimentation sur 50 joueurs et joueuses de rugby victimes d’une commotion cérébrale sur les trois derniers jours.
Cette expérimentation porte le nom de “photobiomodulation”. “Il s’agit d’un casque avec plusieurs modules qui vont diffuser différents agents physiques et notamment de la lumière infrarouge sur la zone à traiter”, explique Philippe Malafosse.
“On sait que la lumière infrarouge a un rôle de booster du poumon de la cellule. Avec beaucoup plus d’énergie, on répare plus facilement le neurone”, ajoute Jean-François Chermann.
Sur les 50 patients, 49 ont fait les trois séances, le casque est posé environ 20 minutes. “Il n’y a pas de toxicité, pas d’effets secondaires, pas de sensation de chaleur ni de brûlure“, précise le médecin du sport. Et les premiers résultats sont très encourageants, notamment en matière d’oculomotricité (la mobilité des yeux) comme l’explique le praticien du MHR.
“Par exemple, un joueur avait de tels troubles visuels lors de la première séance qu’il avait du mal à conduire. Cela s’est effacé après une seule séance, il s’est retrouvé beaucoup plus à l’aise au volant de sa voiture en repartant”.
“Les effets arrivent dès la première séance”, se réjouit Philippe Malafosse.
Jean-François Chermann lui, reste mesuré: “Ce serait une première solution mais je préfère être tempéré. Il y a une attente énorme de tous les joueurs de rugby, c’est évident que si on dit que ça marche et que ça évite des problèmes, tout le monde aura envie de le faire.”
Avant de proposer officiellement le traitement, le chemin est encore long. Les spécialistes se lancent désormais dans une nouvelle étude, celle des commotions qui durent depuis plusieurs mois.
Via RMC Sport