L’assemblée générale de la Fédération Française de Rugby a soulevé le déficit financier de l’instance. Un trou, aux origines multiples et momentanément comblé, mais qui va entraîner une période d’austérité et des économies à faire. Et de l’inquiétude.
Les six premiers mois du nouveau président de la Fédération Française de Rugby, Florian Grill, auront été, selon les dires de l’intéressé, “d’une intensité incroyable.” A tous les niveaux visiblement, au moment d’étaler les comptes de l’instance lors de l’assemblée générale ce samedi matin au Centre National de Rugby de Marcoussis. Devant un parterre de présidents de clubs amateurs, venus voter le budget (les comptes annuels ont été approuvés à 99% et le budget prévisionnel révisé à 88,55%), Grill a, dans son introduction, dressé un tableau pour le moins alarmant des comptes de la FFR.
“Cette période a été d’une intensité incroyable avec d’énormes difficultés financières. Sur deux saisons, on parle tout simplement de 40 millions d’euros de déficit. 16 millions en 2022-2023 et 24 millions en 2023-24. Une partie est couverte par le fonds de pension CVC. Mais tout président raisonnable ne finance pas de l’exploitation avec du prévisionnel.”
Malgré l’argent de CVC, qui est entré au capital du Tournoi des VI Nations et a donc amené de l’argent, l’inquiétude est de mise, d’autant que cette manne financière de la part de CVC s’arrêtera dans deux ans. Il faut trouver au bas mot 15 millions d’euros pour compenser le déficit.
Pas de profits après la Coupe du monde ?
Les sources du problème sont multiples. Déjà, la Coupe du monde n’a pas apporté les résultats financiers espérés. On n’est même pas loin d’une perte pour la FFR. Le GIE, organisme qui a commercialisé les hospitalités, a bien vendu ses 120.000 “packs” à disposition dans les stades, mais ces prestations de loges avaient elles-mêmes été achetées à un prix bien trop élevé à World Rugby au moment de la candidature de la France selon Florian Grill : “Ces hospitalités ont été acquises au prix de 82 millions d’euros. C’est deux fois plus que ce que les autres nations candidates avaient mis sur la table ! Ce n’est pas qu’on a mal vendu, mais que cela a été très, très mal acheté.”
Résultat, puisque la FFR est actionnaire à 55% du GIE, la Coupe du monde ne rapportera que… cinq millions d’euros à la Fédération une fois l’argent redistribuées à toutes les parties prenantes. Et encore, ce chiffre n’est pas définitif, puisqu’une des quatre agences chargées de commercialiser ces prestations frôle le dépôt de bilan. Sa faillite entraînerait cinq millions de perte en plus et donc, le calcul est facile à faire, une totale absence de profits. “C’est une mauvaise surprise, poursuit Grill. Le paradoxe, c’est que tout le monde a un impact positif après cette Coupe du monde : l’Etat, avec les recettes de TVA, l’image positive que ça a donné du pays, les villes hôtes, World Rugby. Et la Fédération pourrait aller jusqu’à perdre de l’argent si l’agence agréée était défaillante. Ce n’est pas possible.”
Quatre millions de perte sans le Stade de France en 2024
Grill regrette également l’investissement de 35 millions d’euros dans la construction du centre Raoul Montbrand de Pantin (93). Un centre d’innovation sociétal du rugby (rugby santé, rugby adapté) qui est “au cœur des quartiers” et qui va être, de par son cadre luxueux pour recevoir les partenaires, associé à des actions évènementielles liées au match du Stade de France.
Mais en parlant du Stade de France, la FFR aurait d’un côté préféré se servir de cette manne pour être partie prenante d’un tour de table sur la future concession de l’enceinte et de l’autre, recevoir des indemnités quant à l’impossibilité de l’utiliser en cette année olympique. Ce que l’ancienne gouvernance n’a pas réclamé et qui va faire perdre quatre millions d’euros de recettes en allant jouer en province lors du Tournoi des VI Nations (à Marseille, Lille et Lyon).
Il faut donc aller chercher de nouvelles ressources et faire des économies. On promet de ne pas toucher au fonctionnement du XV de France, son staff, son organisation. Les Bleus représentent 80% des recettes de la FFR, mais ils resteront certainement plus souvent à Marcoussis et devront se contenter de voyages ou logements plus modestes. Un plan en huit axes a été présenté. En insistant sur le rugby amateur et la volonté de développement dans les écoles.
“Il faut relancer le rugby par la base, a ponctué Grill. Nous sommes le deuxième sport en terme médiatisation mais le dixième en nombre de licenciés. Ce n’est pas possible. Il y a une envie de rugby avec des pointes à 18 millions de téléspectateurs pendant la Coupe du monde, mais il faut convaincre les collectivités qu’il faut investir. On doit développer ce sport.”
Via RMC Sport