Ce samedi soir, le Stade-Français Paris défie Clermont au Stade Marcel-Michelin à l’occasion de la 22ème journée du Top 14.
Interrogé via Midi Olympique, l’ancien demi-de-mêlée emblématique de Clermont, désormais technicien adjoint du Stade-Français, Morgan Parra a évoqué ce match spécial.
Il a hâte de retrouver le Stade Marcel-Michelin qu’il connait très bien. Extrait:
J’aurais tellement aimé pouvoir jouer l’an dernier… Malheureusement, ça n’avait pas été possible. C’est donc la première fois que je vais vraiment revenir dans ce stade avec un autre maillot. Et pour l’anecdote, je vais retrouver sur le banc des entraîneurs Christophe Urios, qui m’a lancé à 18 ans à Bourgoin. Je suis vraiment heureux de retrouver ce stade magnifique où le public est exceptionnel. Pour moi, c’est d’ailleurs une des plus belles enceintes du Top 14, une de celles où les supporters sont de vrais connaisseurs, de vrais passionnés.
Il regrette vraiment de ne pas avoir pu jouer avec Paris à Clermont, la saison dernière. Extrait:
Ça a été un crève-cœur ! Jusqu’au dernier moment, j’ai espéré pouvoir jouer. Mais bon…
Il rappelle être très attaché à Clermont. Extrait:
Je suis né à Metz, mais c’est à Clermont que j’ai grandi, que j’ai construit ma vie d’homme, ma carrière. J’ai vécu des trucs de fous là-bas. Même si j’ai débuté à Bourgoin, un endroit spécial pour moi, aujourd’hui, je me sens auvergnat.
Il se remémore. Extrait:
D’abord, les titres. Pour ma première saison en 2010, on remporte le Brennus. C’était incroyable, même si le bouclier de 2017 a une saveur bien plus forte.
En 2010, je venais d’arriver. Tout était beau, tout était facile. Je n’avais pas connu les années galères du passé. Et tout à coup, je me suis retrouvé à faire partie des premiers joueurs ayant permis à l’ASM de gagner le bouclier. J’ai cru à cet instant que j’allais vivre une épopée, comme Toulon a pu en vivre, comme le Stade toulousain a l’habitude d’en vivre également. J’étais alors convaincu que nous allions enchaîner les succès, que notre génération de joueurs allait devenir dominante.
Or, pendant sept ans, on a galéré. On a enchaîné les désillusions avec des finales de Coupe d’Europe perdues, des demi-finales et des finales de Top 14 encore perdues. 2015 a été particulièrement difficile avec une double défaite en finale de coupe d’Europe et de championnat. Voilà pourquoi je dis souvent que le titre de 2017 est beaucoup plus fort pour moi. Il est le fruit de nombreuses remises en questions, de moments difficiles vécus tous ensemble.
J’ai des souvenirs plein la tête de match de Coupe d’Europe avec le stade Marcel-Michelin totalement plein à craquer poussant derrière nous. C’était exceptionnel. J’en ai encore des frissons juste en évoquant ces matchs.
Il précise ne toujours pas avoir digéré la défaite en finale de la Coupe d’Europe contre Toulon, en 2013. Extrait:
Oui… Je vais vous faire une confidence : la finale perdue de la coupe du monde en 2011 a été longue à digérer. Mais les défaites en finale de Coupe d’Europe m’ont peut-être fait encore plus mal. La défaite en 2013 face à Toulon, je l’ai toujours en travers de la gorge. L’arbitrage d’Alain Rolland ne nous a pas aidés à l’époque, mais bon… C’est comme ça.
Il explique avoir créé de vrais liens d’amitié avec certains joueurs. Extrait:
Les souvenirs sont impérissables. Nous avons tellement partagé que nous avons beaucoup de plaisir à nous revoir. Maintenant, la vie fait que chacun a ses activités. Certains sont partis à gauche, d’autres à droite.
Lorsque j’étais joueur, j’aimais partager du temps avec les mecs autour d’un barbecue, d’un bon verre de vin. Pour autant, nous n’étions pas forcément tous amis. Personnellement, j’ai besoin d’être au contact en permanence pour vraiment créer des liens. Et aujourd’hui, j’ai évidemment conservé des amitiés avec Camille Lopez, Alexandre Lapandry, Julien Bonnaire, Julien Pierre ou encore Benjamin Kayser. Mais je n’ai pas un répertoire extensible. En fait, pour être sincère, lorsque j’étais joueur, j’avais besoin de couper avec le milieu du rugby, de voir ce qui se passait ailleurs, de me changer les idées. Je me suis donc peut-être un peu isolé. Mais je prends toujours beaucoup de plaisir à revoir les mecs avec qui j’ai joué.
Le joueur qui l’a le plus marqué ? Aurélien Rougerie. Extrait:
Sans hésiter, Aurélien Rougerie. Je me souviens avoir été marqué par une certaine froideur au début et une énorme force de caractère. C’était un dur au mal. Je le revois encore avant la Coupe du monde se battre comme un fou pour revenir d’une grave blessure. Il voulait le faire ce Mondial et il l’a fait alors qu’il avait la cheville détruite quelques mois plus tôt. Et je vous invite à revoir ses performances durant la compétition. Il a été incroyable. Et même mentalement. C’est un bonhomme le type. À Clermont, il a connu des défaites et des défaites. Il a été qualifié de « looser ». Mais quelle connerie quand j’y repense ! Ce mec est toujours revenu avec une force de caractère remarquable. Pour moi, il représente vraiment cette culture clermontoise.
Il indique retourner à Clermont de temps en temps. Extrait:
Il m’arrive de temps en temps d’y aller. J’ai d’ailleurs, il n’y a pas longtemps, demandé à Christophe (Urios) si je pouvais passer prendre un café au stade avec les mecs.
Aucun souci, il m’a même invité à passer le voir dans ce bureau. Nous avions pas mal échangé au sujet de l’ASM. C’est quelqu’un pour qui j’ai beaucoup de respect. D’abord, il a cru en moi. Il m’a lancé et donné beaucoup de confiance.
Pourtant, dès son arrivée à Clermont, Morgan Parra avait demandé à retourner à Bourgoin. Extrait:
C’est vrai, je voulais retourner à Bourgoin.
D’abord, heureusement que Vern Cotter ne m’a pas écouté (rires). De toute façon, j’étais sous contrat. Mais j’avais effectivement demandé à être libéré car ça ne se passait pas comme je le voulais. Je voulais juste jouer. Or, Vern n’arrêtait de me demander de travailler encore plus, me répétait qu’il fallait que je sois patient, que je devais me développer physiquement. Or, après la préparation de l’été, j’étais totalement cuit. Durant les trois premiers mois, je n’y étais pas. En plus, j’avais voulu faire du Pierre Mignoni, un joueur extraordinaire qui avait beaucoup apporté à l’ASM. Je voulais vraiment lui ressembler. Mais je faisais fausse route. Je me souviens d’un match en Coupe d’Europe contre les Ospreys où Vern ne m’a pas fait entrer en jeu. Je devenais fou dans ma tête. Mais je me suis endurci.
Dans la foulée, il se dit triste de voir l’ASM dans une telle situation. Extrait:
Ça m’embête de ne plus voir Clermont en haut de l’affiche. Pour moi, le classement de l’ASM aujourd’hui, ce n’est pas normal. Le club mérite mieux. Mais c’est un club aujourd’hui en reconstruction. Et justement, il faut que les gens soient patients.
Mais, je suis un compétiteur et j’espère que le Stade français gagnera samedi soir. Je me souviens de la première fois où je suis retourné jouer à Bourgoin avec le maillot de l’ASM. J’avais tous mes potes en face qui jouaient le maintien. C’était dur. À un moment de la rencontre, je me retrouve à tenter une transformation pour passer devant au score. Et là, Yann Labrit (ancien 3e ligne) passe à côté de moi et me dit : « Sois sympa, mets-la à côté s’il te plaît ». À ce moment, si je passais la transformation, Bourgoin perdait le point de bonus défensif. Dans ma tête, c’était le bordel et clair à la fois. Je jouais pour l’ASM, je devais marquer.
J’ai passé la transformation. Heureusement, en suivant, nous avions remarqué en essai, ce qui me laissait moins de scrupules. Il n’empêche, je suis rentré au vestiaire en larmes.
Il n’aurait jamais imaginé que Clermont puisse se retrouver dans une telle situation. Extrait:
Jamais. Mais de toute façon, même si l’ASM devait jouer le barrage de maintien, je ne les imagine pas perdre. C’est impossible. Cette équipe est dense physiquement. C’est celle qui nous a posé quasiment le plus de problèmes cette saison. Face à l’ASM, on n’a jamais réussi à bien tenir le ballon ou à placer une attaque.