Le directeur du rugby de Canal +, Eric Bayle s’est longuement confié via Midi Olympique pour évoquer les relations entre Canal + et le Top 14.
Ce-dernier a notamment expliqué comment Canal + souhaitait faire encore évoluer l’expérience du téléspectateur lors d’un match de Top 14.
Il se confie. Extrait:
Ce qu’on veut, de plus en plus, c’est rapprocher l’abonné du terrain. Pourquoi ? Parce que la société évolue, que tous les sports se développent et que j’ai envie que le rugby continue d’être précurseur, parmi tous les sports en concurrence sur notre antenne. On a d’autres sports qui le sont énormément et ont une renommée mondiale, comme la Formule 1 : quand Lando Norris gagne son premier Grand Prix, il y a la caméra dans son cockpit, on l’entend hurler, chanter, c’est juste fabuleux et le sport à la télé, ça doit être ça.
Depuis plus d’un an, on travaille avec la LNR et les clubs de Top 14. Au-delà de notre captation originelle (suivre les équipes dans les couloirs, rentrer parfois dans les vestiaires, etc.), on a lancé de nouvelles pistes : l’interview des managers ou de leurs adjoints en tribune pendant les matchs, la steadicam qui rentre sur la pelouse après chaque essai, ou le micro sur les coachs à l’échauffement qui a livré certaines de nos meilleures séquences cette saison.
Eric Bayle est un grand adepte de ces discussions captées par Canal + entre joueurs et entraineurs. Extrait:
C’est fabuleux. Là, on parle aux gens qui aiment le rugby. Tu es chez toi, dans ton canapé devant le CRC, et tu entends Poitrenaud qui discute avec Dupont, mais aussi Michalak qui donne ses consignes au sujet du vent, Szarzewski qui rassure son jeune joueur, Laurent Thuéry qui chauffe Romain Ntamack sur son bouclier… Tout ça, c’est la télé d’aujourd’hui.
Il indique que Canal + a de nombreuses idées pour permettre aux téléspectateurs de se sentir au plus près des joueurs. Extrait:
On a évolué dans les méthodes de captation : les spider-cams, les drones… Ces derniers mois, j’ai aussi négocié avec les équipes de faire un pas en arrière : j’ai demandé à avoir notre caméra qui attend les équipes à leur retour de l’échauffement, cinq minutes avant le coup d’envoi. On entend le souffle, les joueurs qui se tapent sur le torse, le bruit des crampons sur le sol. Ça, ça immerge, ça , c’est de la télé. Enfin, le dernier cas le plus récent, après deux ans de négociation avec la Ligue et les présidents de club qui y étaient hostiles, le micro sur les joueurs…
Il explique dans la foulée pourquoi le micro sur les joueurs est une expérience unique. Extrait:
Le premier exemple avec Jeremy Ward du Stade français a mis tout le monde sur les fesses. On a découvert là un mec qui parlait bien à ses partenaires comme à ses adversaires, et c’était gagné. Sur les phases finales, nous avons fait Damian Penaud, Gaël Fickou, Nicolas Depoortère…
Le rugby est un sport traditionnel et conservateur, mais il n’a pas le choix : il doit évoluer dans son exposition. Son public est âgé. Si on veut aller chercher un public rajeuni, il faut lui donner ce qui lui correspond. On n’est pas dans les réseaux sociaux, nous, on n’invente rien, on ne construit rien ! On récupère juste des choses qui existent et on essaie de les apporter à l’antenne dans les grandes occasions.
Concernant les caméras dans le vestiaire, Eric Bayle préfère temporiser. Extrait:
C’est un autre débat. Si j’osais caricaturer, je dirais que le puriste dit qu’il n’est pas intéressé par les séquences de vestiaires, mais qu’il monte le son dès qu’il en voit une… Pour répondre vraiment à votre question, c’est vrai qu’aux heures historiques de Canal +, au début du Top 14, on a mis beaucoup de caméras dans les vestiaires. Mais à l’époque, on faisait un match tous les 15 jours, en alternance avec le basket.
Aujourd’hui, nous avons sept matchs par week-end, on travaille forcément différemment, on ne veut pas perturber les équipes. Les caméras dans les vestiaires, nous les avons mises pour les phases finales, pour un documentaire qui va paraître bientôt et sera formidable. C’est un effort de la part des clubs mais aussi de notre part, parce qu’on y a glissé des caméras « paluche » qui sont très discrètes pour ne pas dérager les acteurs…
Selon lui, les joueurs sont désormais habitués aux caméras. Extrait:
Le joueur pro n’es plus le même qu’il y a trente ans. Les caméras, il y est habitué, il en voit de partout, et il est par ailleurs en permanence sur son téléphone… Je vais faire ici un clin d’œil à l’actualité récente : quand on me dit qu’on redoute les micros ou les caméras de Canal pour les propos que pourraient tenir les joueurs, je crois que le vrai danger vient des téléphones et des réseaux sociaux. C’est ce danger-là qu’il faut canaliser car, contrairement aux réseaux, les caméras de Canal sont « filtrées ».
Bien sûr, nos images sont sélectionnées. Dans notre car de production, quand nous avons le micro sur un coach, nous avons un chef d’édition qui écoute les 30 minutes d’échauffement pour n’en garder que les deux ou trois meilleures.
Je ne suis pas d’accord pour les caméras dans les vestiaires c’est du voyeurisme. Un point c’est tout !