Il joue demi de mêlée mais a devancé les meilleurs finisseurs du Top 14 l’an passé avec 17 essais au compteur. Le demi de mêlée international (17 sélections) Baptiste Couilloud a même franchi la ligne adverse lors de ses dix derniers matchs avec le LOU, dont deux essais lors des deux premières journées de cette saison. Quel est son secret? A-t-il une méthode? Quelle émotion cela lui procure?
Pour RMC Sport, il parle de son efficacité dans ce rôle de “chasseur d’essais”.
Marquer autant d’essais et attirer la lumière sur soi dans un sport où le collectif est souvent mis en avant, est-ce dérangeant?
Je ne dirais pas que c’est dérangeant. C’est sûr que c’est valorisant, c’est quand même quelque chose d’agréable, on ne va pas se mentir. Ça contribue à la victoire, mais ce n’est pas uniquement ce qui permet de gagner les matchs. Donc on va dire que ce n’est pas essentiel non plus.
En football on connaît les “renards des surfaces” Est-ce qu’il peut y avoir un “renard des 22 mètres” en rugby? Faut-il avoir ce genre d’instinct?
Je pense qu’il faut être attiré par la ligne pour être décisif et marquer des essais, parce qu’il faut sentir les bons coups. Il faut être attiré par la ligne, tout simplement.
Est-ce que ça se travaille?
Il n’y a pas forcément de travail qui est réalisé la semaine par rapport à ça, mais c’est juste sentir les bons coups. Aussi, à force de connaître ses partenaires, ceux qui sont capables de créer des incertitudes, de créer des brèches, tu te mets dans leur roue et tu essaies d’être au soutien la plupart du temps. Parce qu’il ne faut pas se mentir, c’est souvent comme ça que je marque des essais (sourire).
C’est donc plus connaître ses coéquipiers que ses adversaires ?
Oui, plus mes coéquipiers. Mes adversaires, je les étudie, mais pas autant en détail que ce que je connais de mes coéquipiers. Je sais qu’il y a beaucoup de joueurs qui sont capables de créer des brèches et dès qu’ils s’engouffrent dans cette brèche, il faut que je sois à l’intérieur pour finir les coups. C’est un peu mon job.
“J’aime être décisif”
C’est d’être attiré par cette ligne?
C’est vrai que c’est quelque chose que j’apprécie. J’aime être décisif. C’est aussi une manière pour moi d’aider mon équipe. J’essaie de le faire du mieux que possible.
C’est à l’instinct? On n’imagine pas forcément de travail technique…
Oui, c’est vraiment à l’instinct. Dès qu’il y a un franchissement, il faut que je sois en capacité de moi-même casser la ligne et d’être le premier soutien, voire le deuxième. Parce que c’est souvent là que ça se joue. C’est un peu mon objectif personnel de faire ça.
Vous tentez d’anticiper les situations?
Souvent, quand les ballons vont au large, il y a des opportunités qui se créent. En étant à l’intérieur du jeu, j’arrive tout de suite à prendre la direction du franchissement pour que ça puisse être une opportunité d’essai. Il n’y a pas vraiment de recette miracle, mais c’est comme ça que je l’analyse. Après, il y a de bons ballons, ceux qui vont au large, mais aussi les ballons de contre-attaque, où tu sais que ça peut se transformer en occasion d’essai. Tu essaies de suivre et de finir les coups.
Avez-vous conscience de marquer plus souvent qu’un ailier par exemple?
Après, je suis un trois-quarts! Mais c’est vrai que c’est plutôt réservé à ceux qui sont sur les ailes ou les trois-quarts centres. Je ne sais pas, ça fait partie de mon jeu. Comme je disais, j’ai aussi l’avantage de bénéficier de coéquipiers qui me créent beaucoup d’opportunités. Je suis sur une longue série et j’ai eu la chance d’en finir quelques-uns. C’est bien, c’est tant mieux. Mais je le répète, si c’était ça qui faisait gagner tous les matchs, ça se saurait. Aujourd’hui, il faut un peu plus que ça pour être en haut du tableau.
Est-ce grisant d’aller marquer?
Oui, c’est quelque chose que je trouve valorisant pour moi et que j’apprécie. Je ne vais pas dire le contraire. Ça devient parfois aussi un petit objectif pour moi. De se dire qu’il y a peut-être un espace, que je vais y arriver et finalement j’y arrive, ça c’est… (il s’arrête) mais je ne me dis pas qu’il faut que je marque absolument. C’est vraiment à l’instinct. On parle de ça parce qu’aujourd’hui, c’est une série qui se poursuit. Mais sinon, tu ne calcules pas forcément quand tu as des opportunités d’essai. Il faut aller au bout, c’est tout.
“Damian Penaud, c’est vraiment son métier de planter des essais”
L’expérience aide aussi?
Oui, je pense qu’il faut savoir choisir ses moments pour faire la course de soutien qui va bien et pas non plus s’épuiser à chaque franchissement quand tu sens que ça ne peut pas aller au bout. Mais oui, peut-être l’expérience joue un rôle.
Dans la tête? Dans les jambes?
Il y a un peu des deux, je pense. Mais avec le temps, j’ai tendance à dire que c’est presque plus dans la tête. Il faut justement savoir quand il faut faire l’effort pour aller au soutien ou prendre une initiative personnelle. Parce que si tu le fais à chaque fois, forcément tu t’épuises et c’est plus dur de finir les coups derrière.
La saison dernière, avec 17 essais inscrits, vous avez devancé Damian Penaud (14). Après s’être côtoyé en équipe de France, il y a-t-il un petit challenge entre vous deux?
Non, il n’y a pas de challenge avec lui parce que forcément, il a joué beaucoup moins de matchs que moi aussi l’année dernière (16 matchs contre 22, un ratio de 0,8 essai par match pour Couilloud contre 0,9 pour Penaud, ndlr). C’est une évidence que s’il en avait fait autant que moi, peut-être qu’il serait devant au classement. Lui, c’est vraiment son métier de planter des essais. Il sait très bien le faire. Donc je ne me compare pas trop à lui non plus mais c’est vrai que c’est un coriace concurrent.
Est-ce qu’il faut être malin et organisé pour rivaliser?
Je pense qu’il faut être un peu malin. Comme je le disais, il faut savoir gérer ses efforts, saisir l’opportunité quand elle est là. Et c’est tout.
Via RMC Sport