Le sélectionneur du XV de France, Fabien Galthié s’est exprimé dans les colonnes du journal L’équipe.
Ce-dernier a notamment exprimé un certain dépit de voir ses joueurs s’alcooliser à outrance après les matches alors que toutes les semaines, ces joueurs sont préparés à la perfection pour effecteur de grosses prestations sur le terrain.
Il rappelle que tout est préparé au gramme près et au mètre près, pour finalement tout détruire en soirée.
Il s’exprime ci-dessous. Extrait:
“Quand je vois comment on mesure tout au mètre près, au gramme près avec notre nutritionniste… Je passe des heures à étudier une stratégie, un scénario et, finalement, la coutume peut tout balayer. Ce que j’appelle la coutume, c’est la troisième mi-temps. On sait très bien que si on fait une soirée alcoolisée ça double l’effet du match, niveau déshydratation et déchet musculaire. Donc tu ne peux pas t’entraîner comme tu l’avais prévu.
Une remise en question profonde est nécessaire. Je dis profonde parce que tout ça, ces coutumes, c’est très ancré. Avec Jean-Marc Lhermet (vice-président en charge du haut niveau), avec toute l’institution, en écoutant les travaux des États Généraux, on a essayé de comprendre pourquoi ça s’est passé comme ça, et comment repenser notre façon de vivre le rugby. Il faut essayer d’aller plus loin que l’adjectif inadmissible ou intolérable, comprendre notre sociologie, la sociologie de la société, échanger avec des anthropologues. Ce que j’ai commencé à faire.
Ces joueurs-là, on les prépare à dépasser leurs limites. Sans arrêt. Dans leurs clubs, en équipe de France. Être plus fort, aller plus vite, ne pas avoir peur, relever des défis incroyables. Et ils le font. On a cru peut-être qu’une fois la fin du match sifflée, on se douchait et on redevenait facilement des gens normaux. Une fois qu’on a poussé les curseurs de la performance physique, psychologique, intellectuelle, analytique, d’un coup on arrête. On met le costume et on redevient des gens normaux. L’enjeu est là.
On a négligé la problématique de ce retour à la normalité quand les endorphines sont au max. Comment on fait pour redescendre ? Comment on fait pour redevenir des gens normaux ? Ces joueurs vivent dans le rapport de force permanent pour gagner leur place et ils continuent ce rapport de force en soirée parce qu’il y a cette culture de ne pas décrocher, de rester ensemble, d’aller toujours plus loin parce qu’on est des hommes, parce qu’on est un groupe. Après le match, le “je suis capable de le faire” est terminé. Ça n’apporte plus rien.
Dans une équipe de rugby, je pense que 33 % de joueurs ne boivent pas d’alcool du tout malgré le fait qu’ils aient été éduqués avec cette présence-là ; 33 % boivent mais contrôlent très bien et enfin 33 % ont des fragilités par rapport à leur enfance, par rapport au fait que très tôt, parfois dans le car, ils ont commencé à consommer.
La cocaïne ? Je ne dis pas que c’est exagéré ou tabou, mais j’ai peu d’exemples en tête.”