Le pilier gauche de l’Union Bordeaux-Bègles, Jefferson Poirot s’est confié dans les colonnes du journal L’équipe.
Ce-dernier a notamment évoqué sa période délicate à l’UBB lors de l’arrivée de Christophe Urios en tant que manager sportif.
Selon lui, Christophe Urios ne lui a jamais fait confiance. Extrait:
Quand sa signature a été annoncée, j’étais très enthousiaste. Christophe correspondait à ce que j’attendais. Mais on ne s’est jamais trouvé. J’étais capitaine, et pourtant j’avais la sensation qu’il ne me faisait pas confiance. Il me reprenait devant tout le monde, je trouvais ça un peu gros et je n’avais pas forcément d’explication.
Il indique avoir eu des discussions avec son entraîneur, en vain.
Il estime qu’humainement, ça ne collait vraiment pas avec Christophe Urios. Extrait:
Si, on l’a exprimé quelque fois en tête-à-tête, qu’on n’avait pas une super entente. Christophe considérait que j’avais l’aval du groupe et que c’était important pour l’équipe. Malgré nos divergences, dans sa manière de penser ou d’aborder le rugby, j’étais souvent d’accord avec ce qu’il disait. Mais humainement, ça n’a jamais collé. Une forme d’appréhension, de crainte l’un vis-à-vis de l’autre, s’est installée.
En revanche, il n’y a jamais eu de rupture. Pourtant, j’ai été considéré comme l’un des responsables de son éviction (en novembre 2022). C’est faux. Je n’ai pas ce pouvoir. À ce moment-là, nous étions 12e du Top 14, on ne mettait pas un pied devant l’autre. J’ai été pris en grippe sur les réseaux sociaux à cause de ça.
Il affirme avoir été victime de nombreuses insultes et messages haineux sur les réseaux sociaux, lors du départ de Christophe Urios. Extrait:
Avec un petit groupe de joueurs, nous étions considérés comme ceux qui avaient obtenu la tête de Christophe. À cette époque, mon niveau de jeu n’était pas terrible. Du coup, à chaque défaite, j’étais le bouc émissaire. J’ai été la cible de nombreux commentaires négatifs et haineux. J’en ai beaucoup souffert. J’étais très aigri, au point d’avoir un comportement à l’inverse de mes valeurs, comme ne plus taper dans la main des gamins en arrivant au stade.
Je me suis mis “en mode connard” ! J’étais entré dans une sorte de parano. Une poignée d’abrutis avaient réussi à me polluer. J’ai pris la décision de supprimer mon compte Twitter et de ne plus suivre celui du club pour éviter de lire les commentaires insultants. Nous ne sommes pas préparés aux conséquences des réseaux sociaux.
Il avoue avoir perdu le plaisir du rugby à ce moment-là. Extrait:
En 2020, j’ai racheté une société de revente de système d’impression (Burovalie). Je ne prenais plus de plaisir à venir au club. Ma société était devenue mon échappatoire. J’avais de moins en moins le goût du rugby. J’avais presque basculé dans l’après-carrière.
Il l’annonce : si Christophe Urios était resté à l’UBB en juin 2023, il aurait alors pris la décision de raccrocher les crampons. Extrait:
Oui, à la fin de la saison 2022-2023, si Christophe était resté, j’aurais pu raccrocher. Moralement, j’étais à bout. Je n’avais plus l’envie de m’entraîner, ni de jouer. Durant la même période, un de mes meilleurs amis (Yusuf Tuncer) a eu un accident sur une mêlée (en janvier 2023). Il est devenu tétraplégique. C’était très dur à vivre.
Du jour de son accident jusqu’à la fin de saison, j’ai eu des maux de tête. À chaque fois que j’entrais sur un terrain, je pensais à son accident. J’avais moi-même une hernie cervicale. (Il souffle.) Mais nous sommes formatés à encaisser. J’étais tellement engagé dans notre projet collectif que je n’avais pas envie que mes problèmes personnels polluent l’équipe. Tu t’oublies beaucoup. Et on en parle très peu entre nous.
Il avoue avoir joué blessé et avoir beaucoup souffert. Extrait:
On joue tous avec quelques pets. C’est rare d’être à 100 %. J’ai connu un problème aux cervicales en 2021. J’avais une hernie qui poussait sur la moelle épinière. J’ai été arrêté. Même un choc anodin aurait pu avoir des conséquences très graves. Avec des soins, elle s’est résorbée. Puis, à la fin de la saison 2022, j’ai eu cette fois une hernie foraminale. Elle était moins grave, mais elle comprimait le nerf qui descend dans mon bras et entraînait des névralgies.
Je me suis fait infiltrer et j’ai beaucoup travaillé avec un kiné. Pendant un an, ça allait. Mais elle est revenue en janvier 2024. Cette fois, la névralgie était permanente. Je me suis accroché jusqu’en avril. Puis, j’ai dit : stop ! Je suis passé par la case opération avec deux mois d’arrêt. Cela a complètement changé mes aptitudes en mêlée. Ce qui explique mes bonnes prestations depuis mon retour en fin de saison dernière.
Désormais, il va mieux. Extrait:
Je vais beaucoup mieux. Je me suis fait aider… Pas assez à mon goût. J’ai la chance d’avoir une femme hypnothérapeute, mais aussi infirmière en psy. Au quotidien, elle m’a permis d’aller mieux. J’ai fait quelques rendez-vous avec une psy, mais je n’ai pas accroché à sa méthode. J’ai toujours bossé avec un préparateur mental.
La différence, c’est qu’on travaillait sur la performance, pour me préparer au rugby. Désormais, la démarche est plus personnelle, on travaille le “aller mieux”. Christian Ramos (son préparateur mental) me connaît depuis tout jeune. Dans l’approche, nous avons une relation d’intimité. Je peux lui dire plus de choses.
Pour conclure, Jefferson Poirot indique vouloir soulever le Bouclier de Brennus avec l’UBB avant la fin de sa carrière en 2027. Extrait:
Je vais tout faire pour y parvenir. Ça voudra dire que j’ai performé jusque-là et que j’ai encore aidé l’équipe à grandir. Je veux laisser une trace. J’ai rencontré le président Laurent Marti dans un petit café à Figeac. J’avais 19 ans et j’ai finalement fait toute ma carrière à ses côtés. J’ai envie de soulever le Brennus avec Laurent. Je veux le récompenser. Et si c’est le cas, il faudra retrouver ce petit café et y fêter ce titre pour boucler la boucle.