Le manager du LOU Rugby, Karim Ghezal s’est longuement confié via Le Progrès.
Ce-dernier a notamment raconté son arrivée à Lyon en cours de saison afin de renforcer le staff technique du LOU.
Il explique pourquoi il s’est engagé en faveur du LOU Rugby. Extrait:
« J’étais sous contrat avec Paris. Des clubs m’avaient sollicité, dont le LOU avec qui j’ai discuté. Le plus important pour moi, c’est la clarté. Si vous n’avez pas de clarté dans les postes – qui fait quoi -, vous ne pouvez pas avancer. Et quand nous avons discuté cet été, il n’y avait simplement pas la clarté nécessaire pour moi sur mon job. C’est-à-dire entraîner, choisir l‘équipe. Il n’y a pas eu d’animosité. On n’était juste pas d’accord. La clarté n’était pas celle que je voulais pour amener mes qualités. Et si tu ne peux pas amener tes qualités, ça ne sert à rien de venir. »
Il explique quel était le plus gros problème du groupe Lyonnais lors de son arrivée. Extrait:
« Il y avait un problème de constance et de consistance. J’ai beaucoup travaillé sur cette régularité aux entraînements. Je me suis engagé en disant que tout le monde jouera avec moi sur les cinq-six premiers matchs. J’ai tenu mon engagement. Du coup, je leur demande de tenir le leur. S’ils me disent qu’ils vont faire quelque chose, il faut qu’ils le fassent. Il n’y a que le match au Connacht où le groupe n’a pas répondu présent. Même si ça peut paraître étrange, ça m’a presque arrangé, parce que j’ai pu voir des comportements qui m’ont donné pas mal d’indications sur le groupe. J’ai vu ce que je voulais. C’est le seul match qu’on a perdu depuis mon arrivée au LOU. Depuis, on a appris quand même à gagner à l’extérieur avec deux victoires (Parme, Bordeaux) et un nul (Racing) en trois matchs à l’extérieur. C’est quasiment plus que depuis deux ans. Je pense que ça peut faire du bien aussi là. »
Il l’affirme : Lyon a tout pour devenir un très grand club de rugby. Extrait:
« Quand je suis revenu, la première chose que j’ai dite, c’est qu’il y a tout ce qu’il faut ici pour faire un grand club. Il possède des infrastructures exceptionnelles. Mais ce qui m’intéresse le plus, c’est le terrain. Et il faut avouer que le sportif a stagné, voire régressé depuis mon départ il y a six ans. Il faut donc remettre le terrain au centre des priorités du LOU. Parce que si ça ne fonctionne pas sur le terrain, tu peux construire tout ce que tu veux autour, le club n’existe pas. Si tu coules sur le terrain, tout se détruit. Et c’est très dur après pour remonter. »
Selon lui, tous les voyants sont au vert pour aller de l’avant. Il explique pourquoi. Extrait:
« Quand je suis arrivé, j’ai vu un groupe avec de la qualité et un effectif quasiment stabilisé pour la saison prochaine, avec peu de joueurs dans le doute sur leur situation à venir. Il y a donc tout pour réussir la mission. Mais si le club a de très bons joueurs et des internationaux, ils n‘étaient pas tous à leur niveau. J’ai essayé de redonner de la confiance à des gens qui en avaient moins, comme Dylan (Cretin) ou Killian (Géraci). Ma mission était de savoir comment je pouvais les remobiliser en faisant des choses simples. Donc j’ai simplifié tout ce que je pouvais, je suis reparti à l’essentiel, sans chiffres, ni data. Parce que c’est facile de faire compliqué avec les statistiques. J’ai communiqué en disant « redevenir une équipe qui est crainte et respectée ». On devait tous avoir la même vision. Ensuite, j’ai dit qu’on était tous liés les uns aux autres. Je n’ai que cinq mois de contrat, donc on réussit ensemble. »
Il concède ressentir une certain pression. Extrait:
« Il y en a, mais j’aime ça. Pour arriver à bien la gérer, il faut trouver le bon cadre et le bon environnement, avoir des moments à soi. Savoir dire non. Parce que si tu rentres dans la machine à laver, c’est dur d’en sortir. Tu t’exposes physiquement, mentalement. Mais quand on aime ce métier, on n’appelle pas ça la pression. Je suis venu pour apporter de l’impulsion. Et je l’ai amenée sur plusieurs choses. Sur la façon de s’entraîner, j’ai fait des choses assez simples où les joueurs pouvaient se raccrocher. Et beaucoup sont revenus à leur niveau. C‘était plus un problème mental que physique. Il faut simplement avoir les bonnes énergies au même endroit. »
Il explique ensuite sa méthode pour faire en sorte que le LOU performe en Top 14. Extrait:
« Je suis un compétiteur. Je connais le club et les leviers pour fédérer un groupe, parler aux joueurs. Pour un match, il faut toujours raconter une histoire. Quand je suis arrivé, je leur ai dit que j’arrivais à la mi-saison, comme à la mi-temps d’un match. C’était Toulouse en face, une montagne qui n’avait quasiment perdu aucun match, mettait 70 points à tout le monde. J’ai simplement travaillé sur des choses simples en donnant aux joueurs des repères sur le terrain qu’ils n’avaient pas. J’ai beaucoup appuyé sur la façon de jouer, le contexte, le temps, le score. Avec Toulouse, j’ai dit qu’on va jouer des lions. Il faut toujours raconter une histoire aux joueurs pour les l’amener tous ensemble au même endroit. Parce que si vous n’allez pas tous dans la même direction, c’est très compliqué de faire une bonne saison. »
Il confirme être très exigeant avec ses joueurs. Extrait:
« Oui, mais il y a des moments où je relâche. Si vous parlez tout le temps, on ne vous écoute plus donc il faut arriver au bon moment. Par exemple, je fais des réunions très courtes, avec des thèmes très ciblés, des points très simples. Je me suis occupé beaucoup de la défense en arrivant, je l’ai prise un peu en main. Je n’ai rien fait de fou, j’ai mis des repères très simples, j’ai dit on fait ça, deux points pas plus et je vous demande ça. Il faut trouver un chemin qui peut jouer avec l‘équilibre de l’équipe.
Je simplifie les choses au maximum. Au rugby, il y a 60 actions par match, 30 par mi-temps. Donc un mec qui joue pilier, qui va disputer 50 minutes, il va faire quelque 30 actions par match. 30 départs qui vont durer maximum 2 minutes. Donc, le minimum c’est qu’il se lève, qu’il court, qu’il s’engage. Après s’il manque un plaquage, ce n’est pas grave. On pardonnera toujours aussi à un joueur de perdre un match. Mais l’engagement, c’est le plus important. Avant le match à Bordeaux je leur ai demandé : « est-ce qu’on est crédible pour jouer un match à Bordeaux ? ». Je leur ai envoyé les douze derniers résultats du LOU à Bordeaux. Le lundi, je leur ai montré tous les essais bordelais depuis le début de saison, ça durait 6 minutes. Le mardi, j’ai mis tous les essais que Bordeaux avait marqués contre le LOU. Le mercredi, quand j’ai annoncé l’équipe, je n’ai parlé que des duels en questionnant chacun d’entre eux : « est-ce que vous allez exister contre des mecs qui jouent tous en équipe de France ? ». Petit à petit, tu crées une histoire. Et à l’entraînement, même s’il n’avait pas été parfait, je savais qu’on pourrait gagner à Bordeaux parce que j’avais vu un truc différent, une énergie différente. Je leur ai donné alors les clés techniques et stratégiques pour réussir un bon match à Bordeaux. Le LOU n’avait pas marqué plus de dix points là-bas depuis des années. Et les joueurs ont réussi à en inscrire dix en cinq minutes… »
Dans la foulée, il a raconté le retour des joueurs à l’entraînement après leurs vacances. Extrait:
« Je les ai lâchés une semaine, mais j’en ai quand même appelé certains durant leur congé. J’ai écrit à tous les joueurs qui vous font gagner. Vous allez rigoler, et ce n’est pas péjoratif pour eux. Mais ce ne sont pas les Couilloud, les Berdeu, les leaders qui sont affûtés. Ce sont en revanche nos gros-porteurs devant. S’ils ne reviennent pas en forme, l’équipe ne peut pas avancer. Mon job, c’est de faire gaffe à ce qu’ils ne prennent pas de poids, qu’ils arrivent bien. Ceux-là, je ne les ai pas lâchés. Parce que si on manque la reprise, je ne peux pas agir, c’est trop tard. »
Selon lui, le LOU Rugby doit disputer les phases finales du Top 14. Extrait:
« Le LOU doit être capable de faire des phases finales, il a le potentiel et les moyens pour y arriver. On arrive dans un moment charnière de la saison. Le LOU a sorti un peu la tête de l’eau. On est à six points de la 6ᵉ place, mais aussi à six points de la 13ᵉ. Soit on bascule du bon côté, soit on reste accroché dans le fond du classement. Les deux prochains matches contre la Rochelle et à Castres sont importants. Une fois qu’on aura passé cette étape-là, soit on regardera au-dessus, soit en dessous, et il faudra se retrousser les manches. En tout cas, ce n’est parce qu’on est invaincu en Top 14 depuis quatre matches qu’on est arrivé. Prenez l’exemple de Montpellier la saison passée. Les Montpelliérains avaient perdu huit de leurs neuf premiers matchs en début de saison. Ils avaient changé de staff et remporté sept victoires dans la foulée. Ils avaient fait des grosses perfs. Ils sont partis en vacances. Et quand ils sont revenus, ils n‘étaient pas prêts physiquement. Ils prennent 54 points à Toulon et perdent contre Paris à la maison. Ils s’étaient relâchés. Au final, ils ont fait le barrage. Cet exemple est parlant. Il ne faut donc pas se relâcher parce qu’on croit avoir fait le plus dur en gagnant à Bordeaux. Voilà pourquoi les deux matchs qui arrivent sont importants pour savoir de quel côté on va basculer. »